Salah Stétié est né à Beyrouth le 25 décembre 1929, à l’époque du protectorat français sur le Liban, dans une vieille famille de la bourgeoisie sunnite. Son père, Mahmoud Stétié, enseignant, veille à ce qu’il apprenne le français dès son enfance, au Collège protestant français de Beyrouth, puis auprès des Jésuites au Collège Saint-Joseph de l’Université de Beyrouth, où il a pour condisciples Robert Abirached et André Tubeuf. Parallèlement, ce père, poète en langue arabe, lui transmet une solide culture arabo-musulmane. À partir de 1947, il effectue des études de lettres et de droit et suit également l’enseignement de Gabriel Bounoure, le premier de ses maîtres spirituels, à l’École Supérieure des Lettres de Beyrouth, où il rencontre notamment Georges Schéhadé, son aîné d’un quart de siècle à qui il se lie d’amitié jusqu’à la mort du poète en 1988. (...) Il fait partie de la première équipe des Lettres Nouvelles, importante revue en 1953 par Maurice Nadeau et Maurice Saillet, et publie une première version de son ouvrage Le Voyage d’Alep au Mercure de France. Paris devient alors le principal de ses pôles mentaux. Il y fait la connaissance de poètes et d’écrivains essentiels, comme Pierre Jean Jouve, André Pieyre de Mandiargues, Yves Bonnefoy, André Du Bouchet, Michel Deguy et d’autres, et s’intéresse à la nouvelle peinture française de l’époque. Cette passion ne cessera de s’intensifier au fil des années et donner lieu à de nombreuses collaborations avec des peintres majeurs : Zao Wou-Ki, Raoul Ubac, Pierre Alechinsky, Antoni Tapiès et d’autres peintres. Profondément attaché au Liban de son enfance qui demeure le foyer central de son imaginaire poétique, il retourne à Beyrouth en 1955 et enseigne à l’Académie Libanaise des Beaux-Arts, puis à l’École Supérieure des Lettres de Beyrouth, enfin à l’Université Libanaise. Il fonde alors L’Orient littéraire et culturel, supplément hebdomadaire du grand quotidien politique de langue française L’Orient, qu’il dirige jusqu’en 1961. (...) Célébrant à la fois une langue française très pure et les traditions de la poésie arabe, il est l’auteur d’une oeuvre poétique abondante et très dense, où la « réduction » de l’expression et des thèmes visent à l’évocation de l’essentiel humain par des moyens verbaux épurés, la référence à Mallarmé (à qui Stétié a consacré un essai : Mallarmé sauf azur, 1999) s’imposant, du côté occidental. Parmi ses recueils poétiques : L’Eau froide gardée, 1973 ; Inversion de l’arbre et du silence, 1981 ; L’Être poupée, 1983 (traduit en arabe par Adonis, 1983) ; Archer aveugle, 1986 ; Lecture d’une femme, 1988 ; L’Autre côté brûlé du très pur, 1992. Il est l’auteur de nombreux essais, de recueils d’aphorismes (Signes et singes, 1996), de traductions et présentations de poètes arabes, de textes sur la poésie, la langue, l’art et la calligraphie. Son oeuvre manifeste « le désir d’une vigilance et une foi dans la parole de poésie », selon les mots d’Yves Bonnefoy et se découvre « dans une illuminante complexité » (Giovanni Dotoli, Salah Stétié, le poète, la poésie, Klincksieck, 1999). Salah Stétié a été distingué en 1995 par le Grand prix de la Francophonie de l’Académie française ; en 2006 par le Prix européen de la ville de Smederevo (Serbie) et en 2007 par le Grand prix de poésie des Biennales internationales de Liège (Belgique).
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